4500 km : les montagnes du Vietnam

Bon bon bon. Vous attendez sûrement tous et toutes avec impatience la résolution du conflit Marino-Vietnamien : s’en est-elle sortie finalement, et le t-shirt haineux est il déjà en train de se faire coudre par de petits enfants à l’oeil bridé?

Tout d’abord, pour vous distraire de cet important sujet et appuyer les propos de mon carnet précedent, voici une photo de la carte postale que j’ai envoyée à JF la semaine dernière (arrivée en trois jours???) qui illustre le trafic urbain dont j’avais parlé auparavant. Mon effort d’envoyer cinq cartes postales était vraiment hérculéen étant donné que je ne l’ai pas fait depuis un an et demie, surtout parce qu’il n’y avait jamais de cartes postales en vente là ou on était. Il m’a fallu aussi trouver un bureau de poste et expliquer des choses. Mais maintenant que je serai en Asie du Sud-Est, j’ai que ça à faire, alors, enfants du monde, vous pouvez participer au programme PostulPostal en postulant par email avec votre adresse postale (mes amis, plusieurs d’entre vous ont une adresse qui change avec les saisons…).

Nous en étions donc au trafic urbain:

Alors pour retourner au coeur du sujet, nous avons eu du beau temps après être sortis de Hanoi, même si on dégoulinait de sueur à cause de la chaleur. En plus, le trajet vers le nord était extrêmement vallonneux avec des montées et descentes qui n’y allaient pas par quatre chemins. De nouveau on alterne entre pédaler, haletants, à la vitesse d’un grand-père sur la morphine et foncer tête première vers le fond d’une vallée dans un crissement terrible de freins.

Nous avons trouvé que prendre une pause bière froide en début d’après midi était très agréable pour faire changement, mais au jour trois de cette pratique le proprio de la cabane à bière a décidé que nous étions un transport convenable pour lui donner un lift jusqu’à Cao Bang, 50 km plus loin en commençant par une ardue montée de cinq kilomètres.  Au début on trouvait ça ben drôle que le gars ait sauté sur le porte bagages de Sigurd, et on s’attendait à ce qu’il débarque après une centaine de mètres, mais lentement nous réalisions que ses ambitions étaient bien plus sérieuses. Arrivés de peine et de misère au sommet de la montée, incluant trois tentatives infructueuses de dire au revoir au gars, nous avons commencé à nous fâcher. À chaque fois qu’on lui disait de partir, que c’était assez et qu’on avait pas les freins nécessaires pour freiner un tel poids le long de la descente qui allait suivre, il disait ok ok, riait, et sautait comme un tigre derrière Sigurd dès qu’il repartait. J’ai du arrêter une moto passante et la supplier avec des signes de main de nous débarasser du gars, ce qui fut heureusement fait. Autre choc culturel.

le gars s’est aussi emparé de ma caméra et a pris plein de photos de tout autour comme un enfant de trois ans (malgré le fait qu’l possède un Blackberry). Après une demi heure il m’a fallu le saisir par les deux poignets et lui tirer l’appareil des mains de force. Une chance que je savais que je pouvais casser le gars en deux avec mes gros bras et certainement avec mes deux grosses cuisses si nécessaire.

 

 

un joli aspect du Vietnam est la décoration superbe des façades avec de délicieuses et inspirantes combinaisons de couleurs. Malheureusement on se fout des côtés des bâtiments, dont le béton sans fenêtres est laissé tout nu et qui sont en général cinq à six fois plus longues que les façades à cause du système de taxes sur la propriété basé uniquement sur la largeur de ta maison.

J’aimerais reformuler cette dernière phrase… Amélie Girard, ma prof de français du secondaire, je vois ton regard reprobateur sur ton joli petit nez. En tout cas voici un exemple:

 

Ho Chi Minh est partout, comme Lénine l’était par mon temps de jeune communiste.

 

Il y a des minorités

 

Notre carte pourtant assez détaillée nous dit 80 km jusqu’à la prochaine ville, et la rivière qui suit la route nous suggère que ce ne sera pas trop difficile comme journée. Nous arrivons dans la nuit noire après 100 km de folles montagnes (apparemment une montée totale de 2 500 m) et découvrons que le premier hôtel est plein (sauf un dortoir de la grosseur d’un gymnase plein de lits doubles…?) et devons donc avoir recours à une petite auberge qui avait l’air vraiment douteuse et qui affichait des signes alarmants dont la fameuse photo de bébés photoshoppés qui n’est jamais un bon présage. Même en Chine, partout ou nous avons vu un gros poster de bébés était à la fin un endroit horrible.

Exemple :

 

Ici décorés d’accoutrement de Noël, ils peuvent aussi être décorés de fruits ou d’accessoires d’anniversaire. En tout cas, Sigurd ne croyait pas en ma philosophie jusqu’à ce qu’on nous montre notre chambre au sous sol. Mesdames et monsieurs, je n’ai jamais passé la nuit dans un endroit aussi lugubre!

La porte s’ouvre et une lumière blême se fait sur une petite pièce avec des murs pourris. Un grand lit en bois la remplit presqu’entièrement, mais il n’y a pas de matelas, encore moins de draps bien entendu. Je cogne sur le lit pour demander à notre logeuse ou se trouve le matelas, en réponse à quoi elle déplie l’espèce de tapis à sushi en bambou qui est roulé à la tête du lit et me fait “voilà” de la main. La fenêtre n’a pas de vitre et ne se ferme pas, et donne immédiatement sur le mur d’une cabane qui sert soit de porcherie soit de cuisine : on reçoit en tout cas des nuages de fumée, des hommes parlent tout près et le matin on se fait réveiller par des cris de porc qui se fait tuer à moins d’un mètre de nos têtes. OK. Sur le mur, non loin de l’interrupteur, se complait évidemment une énorme coquerelle. Qui n’a pas peur de la lumière. Maintenant, voici un hommage à toi Steve Jobs.

Que fait une jeune blanche avec une éducation supérieure devenue femme dans les bras d’Apple en aperçevant une énorme coquerelle qui n’a pas peur de la lumière sur son mur? Pour mieux me préparer à réagir correctement à cette situation alarmante, je sors mon iPod touch, m’asseois sur le lit et lis d’abord tout l’article Cockroach sur Wikipedia, qui s’avère à ma grande surprise une lécture passionnante! J’apprends qu’on compte sur notre planète 4 500 espèces de coquerelles, dont seule une -la Asian Cockroach – n’a pas peur de la lumière. La coquerelle est aussi une des créatures les plus résistantes de la terre, et peut survivre jusqu’à un mois sans nourriture, 45 minutes sous l’eau et dans un environnement 15 fois plus radioactif que ce qui serait mortel pour un humain. Elle n’a pas besoin de sa tête pour respirer et peut donc aussi survivre sans tête, même si elle serait probablement bien confuse. Les coquerelles ont aussi un esprit d’équipe remarquable lorsqu’il s’agit de la distribution de ressources.  Dans une expérience, on avait placé 50 coquerelles dans un milieu doté de 3 refuges avec une capacité de 40 coquerelles dans chacun. Les coquerelles se sont divisées en deux équipes de 25 pour vivre dans deux des trois maisons, laissant le troisième abri libre. Lorsqu’on a augmenté la capacité des refuges à 50, toutes les coquerelles sont allées vivre ensemble. Wow!

Après toute cette passionnante recherche et une discussion là-dessus avec Sigurd, nous avons donc identifié que notre coquerelle était une Blattella Asahinai et qu’on ne devait pas l’exterminer en essayant de la suffoquer ou de lui couper la tête. J’ai donc été chercher une tasse dans la toilette au troisième étage et Sigurd a performé l’émigration de la créature vers la cabane à cochons adjacente.

Heureusement nous avions aussi accès à un filet à moustiques qui était troué mais qui garderaient hors limites les insectes les plus gros tels que la Blattella Asahinai et le très gros criquet dont une photo suit. Ce qui ne nous a pas empêché d’entendre des va et vient des autres coquerelles et le grincement rythmé d’un très gros criquet qui s’est installé directement sous notre lit.

Voici donc Sigurd qui fait un rapide estimé de la situation

le lit et le tapis à sushi

 

exemple de gros criquet

 

le lendemain matin on se lève très tôt (hurlement de porc oblige) et on essaie pour la n-ième fois de trouver de quoi manger.

Nous voyons que le mercredi c’est le jour du marché et observons quatre ou cinq types de jolies minorités

 

 

qui portent tous la même jupe

 

nous trouvons des biscuits pour le lunch, qui sont très bons mais leur slogan me donne un peu mal au coeur.

 

autre exemple de jolie couleur

 

 

 

 

 

exemple de pente très abrupte

 

 

il y a plein de jolies maisons hawaïennes

 

 

cute

 

le haut d’une montagne

 

c’est un peu joli

 

 

mais vraiment vraiment chaud

 

 

voyez mes grrroooosses cuisses

 

 

maison hawaïenne bis

 

 

 

Puis, joie, on rejoint notre ami suisse Reto au Vietnam, une retrouvaille planifiée et chaudement attendue. Nous faisons découvrir à Reto le Bia Hoi, une bière très fraîche faite maison avec pas beaucoup d’alcool et servie glacée pour très peu d’argent. Tout le monde est ravi de nous voir, spécialement ce monsieur qui nous fait boire plein de verres en disant “Bottmzop” (ce qui voulait dire bottoms up, nous avons déchiffré avec difficulté) et me déclare rapidement son amour.

“Cu tu tu”, Easy Tiger, dit Reto dans un vietnamien impeccable trouvé dans la sexion Sexe du LP Phrasebook.

 

 

L’effet est immédiat!

 

 

Nous profitons du passage de l’affreux typhon Nesat qui est censé frapper le Vietnam aujourd’hui et qui est partout dans les nouvelles pour faire un peu de vélo dans les vallées durement frappées

 

 

Voici comment les gars font face au typhon. Bon ok il a venté pas mal à la fin de la journée, et il a plu pendant une semaine après, mais nous étions quand même bien déçus, nous attendant à quelque chose dans le style du Magicien d’Oz.

 

Sigurd tranche le vent à toute allure

 

 

 

c’est un peu joli (Photo Reto)

 

 

Nous trouvons ces prix d’honneur dans notre chambre d’hôtel. Reto par contre est un peu déçu de sa performance de troisième.

 

 

d’autres minorités

 

 

après une journée froide et pluvieuse de grandes montées nous rencontrons deux hippies australiens dans la vingtaine qui font le tour du Vietnam en vieilles motos décrépies. Ils s’amènent sur notre balcon avec vraiment beaucoup de bière et une guitare et nous passons une belle soirée en composant de folles chansons et en écoutant leurs histoires. Apparemment l’un deux s’est juste fait offrir deux onces d’héroine en boule par un gars dans un mini village. Apparemment ils n’utilisent pas d’autres drogues : c’est l’héroïne ou rien, et le prix était seulement de 25$ ! mais évidemment la transaction n’eut pas lieu… ouf.

Le lendemain de veille, on doit grimper encore un peu

 

 

c’est pas évident!

 

tout le monde rit de nous à la manière de Nelson dans les Simpsons.

 

 

 

À ce moment précis, ma roue avant avait levé d’un pouce à cause du gradient

 

 

c’est très beau comme promis

 

nous sommes à seulement quelques kilomètres de la Chine, c’est pourquoi on a du se procurer un permis spécial pour voyager dans la région, qui est par moments ouverte seulement aux groupes guidés.

 

 

serpentins

 

bis (Photo Reto)

 

 

Reto

 

 

Minorités

 

 

 

 

enfants du monde

 

 

 

 

 

 

 

 

on nous court beaucoup après dans les villages. Les enfants sont très endurants et peuvent atteindre une vitesse de 10 kmh.

 

 

le riz

 

 

 

joli

 

autre exemple de façades

 

 

 

après l’heure quotidienne de recherche de nourriture nous arrivons à expliquer à deux filles qu’on a trouvé dans la cuisine de ce garage qu’on voulait des rouleaux printaniers.  Les filles ont ri aux larmes de notre vocabulaire et nos mimiques, puis la préparation habituelle de la nourriture s’en suivit. Ici, l’art culinaire est très grossier : on prend un bout de quelque chose (légume, viande), on sort un gros coutelas, administre une douzaine de coups rétentissants et jette le résultat dans un wok d’huile qu’on secoue quelques fois. Voilà c’est prêt. Nos rouleaux printaniers sont donc pleins de gros morceaux de cartilage de porc. mmmm! (Photo Reto)

 

 

une jolie petite ville (Photo Reto)

 

 

 

 

les deux belles machines de nouveau réunies…. ahhh

 

 

… (Photo Reto)

 

Leaping Cyclotiger Crouching Velodragon

 

 

cette journée de seulement 30 km nous surprend de panoramas magnifiques, complètement différents du paysage générique de collines vertes qu’on retrouve partout ailleurs dans la région.

 

autres enfants qui nous poursuivent

 

 

 

arbre

 

 

….

 

Notre Burning Hot Rod avec son bandeau de Motor Eagle Fly Cycles que les petites grand mères utilisent aussi profusément

 

 

c’est un circus artist

 

 

cute village (Photo Reto)

 

 

Les gens ici sont vraiment petits! Me voici dépassant un homme dans la quarantaine qui s’élève à peine au dessus des bornes kilométriques.

 

 

vue

 

 

 

je suis innocente

 

 

 

 

 

apparemment dans ce coin il y a pas grand chose à manger, et on persiste à faire de l’agriculture et terrasser des montagnes comme celle là… incroyable

 

 

 

notre descente

 

 

pauvre petite dame avec sa charge de bois.

 

 

ça doit être le resultat du typhon Nesat

 

 

 

 

les enfants du monde ici sont un peu cutes mais assez méchants à ma plus grande surprise. Cet enfant essayait de faire perdre à Sigurd son équilibre, et deux petits perchés sur une colline abrupte un peu plus loins m’ont lancé des roches dessus. Lancées d’une hauteur d’une cinquantaine de metres, elles ont rebondi à un mètre ou deux de moi. Incroyable.

 

 

belle gorge

 

 

quant à ces enfants du monde, ils ont volé la bouteille d’eau de Reto pendant notre séance de photos

 

 

 

 

 

 

Pour ce qui est de la question de la tant désirée honnêteté, nos espoirs n’ont pas été réalisés. On a continué à être super bête avec nous, juste nous dire non tout le temps quand on posait une question, nous chasser des restaurants quand on essayait de demander le prix avant de commander, et une dame dans un village de 200 personnes au fin fond du pays nous a chargé 7$ pour un bol de riz et un oeuf. Nous sommes donc complètement écoeurés de constamment devoir être sur nos gardes et avons très très hâte de partir, mais avons peur d’être aussi déçus par le Laos.

 

HAHAH cette photo me fait tellement rire!

 

 

joli

 

 

Sigurd the Lonely Wolf

 

 

 

 

 

route

 

 

 

Pourquoi pas

 

J’ai tout compris de la vie

 

 

 

 

 

Reto penseur

 

ici on nous dit que “ça coûte 3$” et on essaie de demander ce qu’on va manger pour ce prix (car ça pourrait très bien être un autre bol de riz), mais on s’obstine à nous expliquer que c’est 3$, un deux trois, et on nous l’écrit sur un papier, et on nous le crie, et finalement on nous jette dehors.

 

 

Notre chambre cinq secondes après notre arrivée

 

 

Sigurd essaie de dessiner mon portrait

 

je n’ai pas le résultat sous la main, mais pour vous donner une idée voici d’autres exemples d’art Sigurdien en direct de mon agenda. Le lundi nous avons donc un cheval (oui oui!) qui a son anniversaire, le mardi un chat qui fait du vélo, le mercredi une girafe en skateboard et vendredi un élephant de cirque.

ça me fait penser aux heures de plaisir que j’ai passées à rire aux larmes des dessins de ma mère dans un style similaire, hein maman

… (Photo Reto)

 

 

 

Équipée pour le succès : il faut s’hydrater

 

 

pour finir, à la demande générale une photo d’un monsieur qui fait du radeau debout sur la rivière avec un bout de bambou.

 

Donc pour repondre à la question initiale, les choses ne se sont pas vraiment améliorées, et malgré la joie de revoir Reto et la beauté de cette unique journée dans le grand nord au paysage époustouflant, chaque journée nous apporte une déception. Les gens nous paraissent cyniques et personne ne nous a vraiement aidé à rien. Et on n’a toujours pas réussi à trouver notre déjeuner, dîner, souper en moins d’une heure. D’ultimatum en ultimatum, nous avons quitté des restaurants affamés et avons fait en vélo des bouts qu’on voulait faire en autobus malgré la pluie et les côtes, on ne rencontre que des faces dégoûtées en essayant de communiquer quoi que ce soit à qui que ce soit et on a vraiment hâte de partir.

Le Laos c’est pour dans deux jours, après beaucoup de train, et on est pleins d’espérance.

 

 

3 Comments

  1. C’est fascinant de vous lire… j’ai grand plaisir à découvrir chaque article, récit et photo. Je suis impressionné par votre ténacité et votre courage avec toutes ces montées, si en plus il faut se protéger des enfants lanceurs de caillou… ce n’est pas très chic.
    Je ne pensais pas du tout découvrir ce genre de récit sur le Vietnam.

    Bon courage et j’espère que le Laos vous réservera un accueil plus chaleureux !

  2. Démentielles les photos, comme toujours !

    Ce pays ne me semble pas apprécier les blancs, sans doute des décennies de propagande communiste Vietminh anti-Française et anti-Américaine y sont pour beaucoup.
    Ce n’est pas de leur faute, c’est leur système qui les a façonnés.

    Un ami à moi a quant à lui été déçu par la Russie en tant que touriste, il se faisait entuber en permanence et partout d’une façon mesquine et sournoise, Marina peux-tu confirmer cela ?
    Genre la serveuse qui dit qu’elle n’a pas reçu assez d’argent et qui montre le billet de 100 qui s’est magiquement transformé en billet de 50 dans sa main ! Et cela sans arrêt.

    Bonnes ballades !

    Manu.

  3. ouain la Russie c’est pas evident quand on est habitue a un sourire Colgate lorsqu’on se fait servir… meme pour les russes c’est pas vraiment plaisant, mais on considere se faire servir une necessite desagreable vite oubliee et n’y prete pas beaucoup d’attention. un peuple plein de passion mais plein de durete, je ne sais pas pourquoi… jy reflechirai pendant mes kilometres aujourdhui

Leave a Reply