Polynésie Française – ca sonne tellement romantique, et c’est là que le grand marin à barbe Moitessier est allé pour être complètement heureux au lieu de rentrer en France et récolter l’honneur de la plus rapide navigation autour du monde sans arrêter. Il a laissé derrière son ancienne vie, sa femme, et s’est installé dans ce petit paradis ou il avait laissé son coeur lors de sa première visite. Seulement quelques jours ici et les Francais qu’on rencontre (très peu nombreux heureusement – les Marquises du moins sont restées très traditionnelles) semblent tous avoir la même histoire de coup de foudre.
Nous avons vu la terre au matin du 19e jour de mer – des montagnes! En s’approchant de la première île, très aride d’un côté et verte de l’autre, nous avons levé nos mentons vers les falaises colorées.
La végétation improbable sur la roche volcanique nous a surpris – allez petit arbre vert fluo!
des couleurs, des arches, un petit village de deux maisons, une plantation de cocotiers
Nous longeons la première île lentement et tout près de la côte pour bien apprécier ces étranges paysages
tout d’un coup un petit oasis, ou nous avons pensé nous arrêter mais la baie exposée n’offrait pas le refuge dont on avait besoin
finalement, nous passons la petite île et passons à la prochaine, plus grande, notre destination. Nous décidons de ne pas nous ancrer tout de suite au village et optons plutôt pour une baie de l’autre extremité de l’île : nous avons entendu que c’était un endroit magnifique et quand nous passons le cap nous comprenons que nous sommes entrés dans notre rêve le plus fou
Dans la lumière du matin la côte
Nous avons eu une soirée de célebration décousue et maladroite car pour le voyage entre les deux îles, Sigurd et moi étions responsable du bateau et de l’ancrage alors que nos copains de l’hémisphère sud étaient complètement bourrés. Nous avons aussi eu la désagréable mésaventure de devoir aller les cueillir de l’eau car à mi chemin le capitaine a décidé de sauter par dessus bord et, dans un élan incroyable d’incohérence, l’Australienne a aussi sauté au lieu de nous aider à la maneuvre. Nous avions donc deux personnes bourrées en train de dériver dans un fort courant à récupérer. Les “victimes” ne collaboraient pas à leur propre sauvetage et refusaient de nager, attraper une corde ou monter sur le bateau, alors l’épisode a laissé un goût désagréable dans nos sobres esprits.
Apparemment, nous les deux nordiques ne partageons pas nécessairement les mêmes valeurs que nos colocataires et ne retirons pas nos plaisirs dans la vie à partir des mêmes choses, mais heureusement nous négocions le quotidien ensemble sans problème depuis des mois déjà.
Le lendemain matin tout était plus ou moins pardonné et nous avons pu apprécier l’endroit ou on était – une baie complètement à l’abri, entourée de vertigineux murs verts. Nous avons fait la fête de 7am a 11 am et, bien réchauffés, nous avons décidé de charger la terre ferme.
Une vue exotique vers notre catamaran!
Tous les palmiers, tous les cocotiers, aiyaaah
Vont rester pareils quand j’srai partiiii
En marchant un peu sur la plage nous voyons au fond de la baie une sorte de maison sans vraiment de murs, accotée contre une falaise d’un côté et la mer de l’autre. Il y a des vaches et des cochons dans l’étable.
Et il y a une personne! Une vraie autre personne qui bouge! On gesticule passionnément et il nous répond – on s’approche d’un bel homme brun dans la trentaine, son torse nu tatoué, et avec un grand sourire il nous sert une généreuse accolade. Je m’appelle Ma’i. Venez chez moi, dans ma maison! Dans sa maison, il y a la brise, la vue sur mer et le bruit des vagues, on marche pieds nus sur la terre battue. Les matelas sont jetés sur une grande plateforme en bois d’un côté, les murs sont tapissés de photos de voiliers et partout il y a des disaines de drapeaux qui lui ont été offerts en cadeau par d’autres bateaux. Dehors, à la table, des rideaux de coquillages clacotent dans le vent.
Autour, des cocotiers, des bananiers, des arbres chargés de pamplemousses vertes grosses comme des choux, et les canards et les chatons et les poules grignotent des moitiés de noix de coco déposées par terre pour eux. Incroyable! Et il y a seulement lui, et nous, et la mer, et les montagnes.
Il parle un bon français – les Marquisiens parlent le marquisien à la maison, mais à l’école on leur apprend en plus le français, le tahitien et une langue au choix parmi l’anglais, l’italien et l’espagnol! Il nous invite à dîner le soir chez lui, et en attendant on fait un tour du reste du bled populé de douze personnes.
Plusieurs maisons sont laissées vide car les gens partent à Tahiti pour étudier ou travailler – aux Marquises il n’y a pas d’école secondaire et le travail se fait rare.
Près de chez Mai, il y a une rivière qui se déverse dans l’océan et on est choqués par un tel “gaspillage” d’eau fraîche! Nous nous sommes lavés une fois par semaine à l’eau salée, avec d’occasionnels rinçages d’eau douce mesurée à la tasse. Regardez toutes ces plantes!
Tous ces palmiers!
Toutes ces plantes de bureau à l’état sauvage! Celle à feuilles claires est particulièrement disponible dans tout bon magasin en version plastique + tissu.
Identifiez les plantes de bureau illustrées ci-dessous. 5 points par bonne réponse!
La nature est généreuse ici et tout est fleurs géantes, arbres géants avec des feuilles géantes, palmiers géants… et tout est plein de couleur
la tête bien haute
Les filles portent une fleur d’hibiscus ou de magnolia derrière une des oreilles – elles sont belles avec de beaux cheveux longs et tressés, une peau toute soyeuse et bronzée et le sourire dans le visage… Les gars sont beaux aussi, musclés et tatoués de motifs traditionnels autour des bras, sur le torse ou même sur le visage! Tous ont l’air sains, pleins d’énergie et toujours prêts à montrer leurs belles dents.
Les hibiscus sont tout partout!
Le soir on revient chez Mai et on fait la connaissance de deux gars d’un autre voilier et aussi d’un gars de sa famille et sa femme, qui a cuisiné pour tout le monde le festin de chèvre au lait de coco et papaye verte, salade, poisson cru en salade de tomates et coco, riz parfumé, papaye sucrée, pain-fruit (breadfruit?) et je ne sais plus quoi d’autre. Nous passons une joyeuse nuit à parler, manger cet absolument délicieux festin en balbutiant des éloges entre les bouchées, fumer la pipe, chanter des chansons et siroter, après la bière, la liqueur aux fruits que Mai fait dans un tonneau derrière la maison.
Je suis tombée en amour et en admiration! Les Marquisiens que j’ai rencontrés pendant les derniers quatre jours ont un sens de l’humour qui est tout à fait mon genre, un grand sourire, et leur vraie générosité n’est pas enrobée de futiles politesses – ils sont directement chaleureux. S’ils ont envie que tu leur donnes tel truc ou les aides avec telle chose, ils te demandent simplement. En plus, il est difficile d’imaginer qu’il y ait un type de personne qu’ils n’aimeraient pas avoir comme ami. Malgré les milliers (!) de voiliers qui sont passés chez Mai et ont juré de retourner, il n’est aucunement blasé et on se sent au contraire comme les premiers : il y a dans son accueil et celui de sa charmante et belle compagne Maria une énergie qui nous a fait sentir qu’on était immédiatement acceptés peu importe comment on est et d’ou on vient.
J’admire beaucoup qu’ils aient su retourner à leur belle langue et leurs belles traditions après que la France ait terminé de leur imposer l’usage exclusif du français. Ils possèdent aussi la clef de mon coeur avec cette nourriture paradisiaque qu’ils savent faire dans toutes les déclinaisons de desserts, boissons, salades, plats chauds…
Bref, moi aussi je suis tombée sous le charme et je ne veux plus partir, ou du moins j’aimerais me promettre de retourner ici et continuer de partager leur grand bonheur au milieu d’une nature époustouflante.
À une heure et demie de marche à partir de chez Mai il y a une vertigineuse cascade qui dévale ses six cents mètres verticaux en un gracieux filament blanc qui se voit de très loin.
La randonnée est géniale, toute dans la belle foret tropicale avec des beaux points de vue ici et là
En arrivant au fond de la vallée on est entouré de falaises vertes de tous les côtés, et l’echo de ma voix résonne bien. Le bruit de la cascade se fait entendre et bientôt on nage dans la petite lagune au pied de la chute. Sigurd, le capitaine et moi savourons le plaisir de nager sans vêtements comme si on était les êtres purs de Lagon Bleu. L’endroit est magique et la nature est forte.
Quels paysages s’offrent à nous sur le chemin du retour!
…
Nous avons invité Mai, sa femme, son fils et son beau père à manger une lasagne sur le bateau hier, et ce fût une autre grosse fête pleine de musique jusqu’à trois heures du matin!
Étrangement il me sort de la bouche des chansons russes longtemps oubliées – j’ai hâte de vraiment les retrouver maintenant que je me suis procurée les paroles.
Demain Mai nous amènerait chasser la chèvre sauvage au plateau juché loin au-dessus de sa maison et samedi il devrait y avoir une grosse fête chez lui avec plein de gens du village et d’autres voiliers, avec un four marquisien de porc peut être et je ne veux pas que le temps passe trop vite!
Une semaine ici n’est vraiment pas assez.
Ochen’ krasivo napisano! Mojno izdavat’ knijku! No ia ochen’ bespokous’ pro kapitana i devchonku! Nadeus’ oni ne podvedut v trudnuu minutu? Oni cto tam, obkurilis’?
Très belle écriture!
Merci pour la visite de ton site. Nous avons aussi passé 2 semaine à Nuku-Hiva en 2008 et nous sommes partis en nous jurant d’y revenir. C’est notre coup de coeur pour cette région mais partout e Polynésie nous avons connu le bonheur avec des habitants adorables. A Rangiroa nous avons connu une faille adorable, à Maupiti nous avions l’île pour nous, à Hahiné, nous avons aussi adoré et je ne parlerais pas de Bora, Tahaa, Moréa…. et j’en passe. Petite déception à Tahiti car nous l’vions connue plus clame il y a bientôt….hé oui sa passe vite.
Encore merci pour votre voyage partagé.
gapion